Aujourdhui, pas de résumé. Non mais sans blague, vous navez quà relire lépisode précédent ! Dailleurs, il le mérite.
JB nen revenait pas. Le document quil venait dexaminer à la loupe, et qui faisait la convoitise de tous les Services secrets du monde occidental, oriental et septentrional, ce document quil détenait à présent de manière exclusive nétait autre que lensemble des plans du déconographe !
Le déconographe ! Cette fabuleuse invention dun savant uruguayen, enlevé par les Russes en 1983, et retrouvé noyé dans un lac suisse deux ans plus tard ! Le déconographe, dont la possession devait assurer aux Services qui le détiendraient la suprématie absolue dans le domaine de la déconographie, technique de pointe nouvellement conçue par les chercheurs américains, experts comme chacun sait dans cette branche des plus pointues !
Et cest finalement notre pays qui, la mission de JB ayant pleinement réussi, jouira de cette suprématie ! Ah ! lecteurs, lémotion nous étreint, au point que nous avons peine à continuer. Mais il le faut, nos millions de fidèles attendent, haletants.
Lorsquil comprit quil avait en mains les fameux plans, JB sentit sa poitrine se gonfler dorgueil : ainsi, grâce à lui, à son intelligence, à son esprit de décision, à son énergie indomptable, lextraordinaire invention du professeur Yadlabrez (lavais-je nommé ? Non. Alors, voilà qui est fait) ne tomberait pas en possession dindividus qui, non contents dexercer le métier despions, ce qui nexiste pas chez nous puisque nous navons que des contre-espions, ne sont, en outre, même pas français. Allons, il avait bien mérité de sa patrie. Et JB se voyait déjà, par une radieuse matinée de printemps, décoré par le Président de la République dans la cour dhonneur des Invalides. Cela lui procura un sentiment deuphorie, qui ne le quitta guère durant son voyage de retour à Casablanca, et qui devait atténuer, sans le supprimer tout à fait, le tourment quil ressentait devant la cruelle séparation davec la douce Natacha, élue de son cur.
Son avion, exceptionnellement, nayant ni explosé en vol pour cause de porte mal fermée, ni été détourné par un quelconque héros armé jusquaux dents au nom de la paix dans le monde, JB parvint sans encombres au terme de son périple hollandais.
On la deviné, ce récit est autobiographique. Comme nous sommes modeste le lecteur laura certainement remarqué et que nous voulons éviter dhumilier notre public en faisant étalage de nos dons et des avantages flatteurs que notre mérite ne cesse de nous valoir, nous ne nous étendrons pas sur laccueil qui nous fut fait, de la part de nos supérieurs hiérarchiques dabord, ce que notre exploit rendait tout à fait naturel, de la part de nos collègues ensuite, qui, la renommée ayant embouché ses célèbres trompettes, nous firent un triomphe que nous neûmes pas la fausse modestie destimer exagéré.
Certes, saint Paul proclame que nous avons le droit de nous louer nous-même lorsque autrui ne nous rend pas justice ; mais nous ne tomberons pas dans ce travers, puisque, en loccurrence, la vox populi voulut bien reconnaître notre valeur. Dailleurs, pouvait-elle faire autrement ?
Seule, Nadia, la secrétaire particulière du Vieux, nassista pas à la réception qui fut donnée en lhonneur de notre héros dans la salle de réunion des Services, au dernier étage de la tour de verre et dacier qui dominait orgueilleusement la place du Général-Oufkir, au cur de la ville.
Cette absence sexpliquait ainsi : JB, qui joignait à ses qualités physiques et intellectuelles au-dessus du commun ce caractère heureusement enjoué et cet esprit des plus fins que chacun lui reconnaissait, toujours à laffut dune plaisanterie pourvu quelle fût de bon goût, lui avait offert le fameux vibromasseur dAmsterdam. La blonde enfant, on ne sait trop pourquoi, avait vu là une allusion à certains aspects de sa vie privée, chuchotait-on, et, depuis lors, elle boudait.
Comme si lon pouvait bouder JB !
Et, pour une fois, ce chapitre sachèvera sans aucun élément de suspense, cela pour démontrer que, si nous tirons à la ligne comme le veut la tradition des auteurs de feuilletons, nous savons aussi, parfois, nous affranchir de la tyrannie de la règle ainsi que certains nous ont fait lhonneur de le noter maintes fois.
Rendez-vous donc au prochain épisode, dans lequel notre histoire prendra sans doute un tour nouveau.
En attendant, soyez continents, car les excès raccourcissent lexistence.